Pourquoi faut-il écouter son corps ?

Vous avez remarqué qu’on va droit dans le mur quand on n’écoute pas son corps ? C’est parce que le corps mémorise tout, sait tout, dit tout. Témoignage personnel pour vous aider à comprendre.

Le corps nous dit toujours la vérité. Il est d’une authenticité à toute épreuve. C’est pourquoi nous avons tout intérêt à l’écouter, à le tenir en haute considération. Sauf qu’avant d’y arriver, il faut commencer à véritablement « habiter » notre corps. Ce qui n’est pas gagné dans notre culture où la tête et le corps sont encore trop souvent considérés comme deux éléments séparés–une aberration pour les yogis !

Il faut dire que c’est tellement facile de vivre déconnecté de notre corps. Prenez mon exemple. La petite quarantaine, je travaillais dans une multinationale où je produisais un magazine d’entreprise à gros budget. Une édition sortait tout juste qu’il fallait bûcher sur la suivante. Une vraie machine à broyer. A ce moment-là de ma vie, mon corps, c’était ce « système » qui me permettait d’aller d’un point A à un point B, d’accomplir les tâches de la journée. Point barre.

Et puis, à 42 ans, le ciel m’est tombé sur la tête. On m’a diagnostiquée un cancer du sein localisé. Chirurgie. Chimio. Radiation. Jamais de ma vie je n’avais imaginé que mon corps pouvait me lâcher.

Un cadeau immense

Peu après la chirurgie, la vie m’a envoyé un cadeau immense : j’ai atterri, par hasard–mais est-ce que c’était vraiment un hasard ?–, dans mon tout premier cours de yoga. Révélation. Aline, qui allait devenir ma prof de yoga jusqu’à sa disparition 14 ans plus tard, m’a emmenée dans un voyage que je n’aurais jamais imaginé.

En me guidant dans des exercices de respiration combinés à des mouvements simples et lents qui engageaient tout le corps, elle m’a poussée à me connecter avec mon corps. Pour la première fois, j’ai écouté ce qu’il me disait : j’étais épuisée, vidée, j’étais devenue un robot. Plus tard, j’ai compris que la maladie n’était que le symptôme, l’expression de cet épuisement.

« Le yoga n’a rien a voir avec le renforcement musculaire »

Au fil des cours de yoga et d’un long arrêt maladie, j’ai pu éponger la fatigue. C’est là qu’a commencé une nouvelle phase dans la relation avec mon corps. Grâce à la respiration et les poses de yoga, j’ai ressenti des nœuds, des restrictions presque partout. Aline disait, « le yoga n’a rien à voir avec le renforcement musculaire. C’est une pratique qui aide à dénouer les tensions qui s’inscrivent dans le corps sous forme de tensions et sont issus des schémas répétitifs d’anxiété et de peur qui viennent de la petite enfance ».

Tellement vrai. J’avais grandi auprès de parents à la fois aimants et immatures émotionnellement, tous deux consumés par la peur, la peur de manquer, la peur d’être abandonné, la peur d’exister même. Inévitablement, j’ai suivi leurs pas.

Ecouter notre corps, ça prend du temps

On m’avait appris à répondre aux besoins des autres avant les miens. Cela laisse des traces, des tensions dans le corps que je ressentais au fur et à mesure que je pratiquais le yoga. Sur le tapis, j’ai aussi réalisé que le métier de communicante que j’avais exercé pendant plus de vingt ans n’avait, au fond, pas de sens pour moi. J’ai pris conscience que j’avais laissé partir, bien longtemps auparavant, la Elisabeth qui ne rêvait que de danse, de mouvements et de théâtre, d’échanges profonds avec les autres. Alors, j’ai pris la décision de devenir yoga thérapeute. En retrouvant cette Elisabeth-là. En écoutant enfin mon corps.

Se donner la permission de ressentir

Ecouter notre corps, ça prend du temps, il faut se donner la permission de ressentir. Et pour ressentir, il faut avoir le courage de ralentir. Se poser. S’amarrer à un état de relaxation profonde. C’est la seule solution. Le yoga est un outil idéal pour nous y aider.

Ecouter notre corps, c’est une mission de chaque jour. Ça ne va pas de soi pour tout le monde, pas pour moi en tous les cas. C’est la raison pour laquelle je retourne sur le tapis de yoga, presque tous les jours. Parce que j’ai encore tellement à ressentir, à dénouer.

Ecouter notre corps ne va pas régler tous nos problèmes, loin de là, mais cela va nous aider à être plus authentique avec nous-même et les autres, à faire des choix qui correspondent davantage à notre nature profonde et, par conséquent, à nous sentir plus vivant, quelles que soient les circonstances de la vie. Et ça, c’est déjà beaucoup.