« L’empereur de toutes les maladies » : une biographie du cancer

Il faut démystifier le cancer et déstigmatiser les patients. Pour y parvenir, nous devons d’abord nous informer sur ce qu’est cette maladie aussi vieille que le monde. Si vous avez été touché par le cancer—que ce soit personnellement ou à travers un proche—, je vous recommande de lire le prix Pulitzer 2011 de l’essai. Il raconte quatre mille ans de combat (médical). Idées extraites du livre de Siddhartha Mukherjee.

Siddhartha Mukherjee, oncologue et chercheur, a écrit L’empereur de toutes les maladies après qu’une patiente lui ait posé une question à la fois simple et profonde : « qu’est-ce que je combats » ?

Cette question l’a conduit à écrire une biographie du cancer pleine d’humanité, des tout premiers traitements chirurgicaux, aussi innovants qu’inhumains, aux risques démesurés pris par les premiers chimiothérapeutes et leurs patients, en passant par les travaux des époux Curie sur les radiations.

Je partage ici des thèmes et des idées développés dans le livre. Avec l’espoir qu’ils vous donnent une idée de sa richesse.

Qu’est-ce que le cancer ?

  • Le cancer est une maladie de croissance incontrôlée. Imaginez chaque cellule de votre corps comme une minuscule machine avec des instructions pour croître et se diviser. Normalement, les cellules suivent ces ordres. Mais dans le cas du cancer, ces instructions se dérèglent et les cellules continuent de croître et de se multiplier sans fin.
  • Chaque cancer est unique. Aucun cancer ne se comporte exactement de la même manière, même chez une même personne.
  • Bien que nous considérions souvent le cancer comme une maladie moderne, il est en réalité très ancien. S’il semble plus courant aujourd’hui, c’est parce que les gens vivent plus longtemps, laissant ainsi plus de temps au cancer pour se développer.

    Les premières tentatives de traitement du cancer
  • La plus ancienne mention du cancer remonte à l’Égypte ancienne en 2500 avant J.-C.
  • Au Moyen Âge, il n’existe pas encore de véritable compréhension de la maladie, et les traitements sont inhumains—impliquant l’utilisation du feu, de l’acide et de bandages en cuir.
  • Au XIXe siècle, un chirurgien nommé William Halsted met au point la mastectomie radicale, une opération qui consiste à retirer non seulement les tumeurs, mais aussi des sections entières du corps dans l’espoir d’éradiquer la maladie.

    L’essor des traitements modernes
  • Au début du XXe siècle, la science fait un bond en avant. La découverte du radium par Marie et Pierre Curie permet l’utilisation de la radiothérapie pour tuer les cellules cancéreuses. Mais ironiquement, une exposition prolongée aux radiations provoque, elle-même, des cancers—Marie Curie décède finalement d’une leucémie.
  • La chimiothérapie trouve son origine dans la guerre. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le gaz moutarde se révèle capable de détruire les globules blancs. Les scientifiques se demandent alors : Et si nous pouvions utiliser un produit chimique similaire pour tuer les cellules cancéreuses ? Cette idée conduit à la mise au point des premiers médicaments de chimiothérapie dans les années 1940. Mais à ses débuts, la chimiothérapie est incroyablement toxique.

    Le combat pour le progrès et la prise de conscience
  • Dans les années 1970, le traitement du cancer n’est pas seulement une lutte contre la maladie, c’est aussi une bataille au sein de la communauté médicale. Les chirurgiens, les radiologues et les chimiothérapeutes ont chacun leurs idées sur la manière de combattre le cancer et entrent souvent en conflit au lieu de collaborer.
  • En dehors des laboratoires et des hôpitaux, une autre bataille se déroule. Des militants comme Mary Lasker poussent le gouvernement américain à financer la recherche, ce qui conduit les États-Unis à déclarer une « Guerre contre le cancer », toujours dans les années 1970.

    La prévention : le meilleur remède ?
  • En 1775, un chirurgien britannique remarque que les jeunes ramoneurs développent un cancer du scrotum à un rythme alarmant, établissant un lien avec l’exposition à la suie. C’est l’une des premières découvertes d’une cause environnementale du cancer.
  • Dans les années 1950, des études confirment ce que nous considérons aujourd’hui comme une évidence : le tabagisme provoque le cancer du poumon. Mais diffuser ce message n’est pas facile. Les premières mises en garde sur les paquets de cigarettes dans les années 1960 n’évoquent même pas le cancer ! Il faut des décennies de militantisme pour obtenir les avertissements clairs et directs que nous connaissons aujourd’hui (aux Etats-Unis).

    Une approche plus humaine
  • Nous sommes dans les annees 1950. Les patients atteints d’un cancer en phase terminale sont souvent ignorés, laissés sans soulagement de la douleur et privés de dignité dans leurs derniers jours. Cela change grâce à Cicely Saunders, une ancienne infirmière devenue médecin à Londres, qui révolutionne les soins palliatifs—une approche centrée sur le confort, le soulagement de la douleur et le soutien émotionnel des patients en fin de vie. Son travail contribue à la création de la médecine palliative, transformant la manière dont nous prenons soin des patients pour lesquels il n’existe pas de guérison.
  • A partir des années 1980, les activistes du SIDA se battent pour promouvoir la notion de médecine centrée sur la personne. La communauté du cancer, elle aussi, bénéficie de ces actions.

    L’avenir du traitement du cancer
  • L’une des plus grandes avancées dans la compréhension du cancer survient lorsque des scientifiques découvrent que le cancer n’est pas un phénomène aléatoire—il est génétique. Dans les années 1970, des chercheurs constatent que certaines mutations dans les gènes des cellules normales pouvent les transformer en cellules cancéreuses.
  • Des chercheurs séquencent le génome (la totalité des 23000 gènes) d’une multitude de cancers rendant ainsi possible de documenter chaque changement génétique. Ils comprennent que chaque cancer est unique car le génome de chaque cancer est unique.
  • Il est possible que nous soyons intrinsèquement liés au cancer, que la maladie soit l’ultime étape de notre vie. Mais si le cycle terrifiant des traitements, des rémissions, des rechutes et, à nouveau, des traitements peut s’allonger, alors nous pourrons changer le regard que nous portons sur cette maladie.